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TDC 040 - L'adultère commis dans le coeur

TDC 040 - L'adultère commis dans le coeur

Publié par Incarnare le mercredi 23/09/2009 - 16:13

1. Durant notre dernière réflexion, nous nous sommes demandé ce qu'était le "désir" dont parlait le Christ dans le Discours sur la Montagne Mt 5,27-28. Nous nous rappelons qu'il en parlait à propos du commandement: "Tu ne commettras pas d'adultère" "Désirer" (de manière plus précise: "regarder pour désirer" se trouve défini comme "un adultère commis dans le coeur". Cela donne beaucoup à réfléchir. Dans les réflexions précédentes, nous avons dit que le Christ, en s'exprimant de cette manière, voulait indiquer à ses auditeurs l'éloignement de la signification sponsale du corps tel qu'il était expérimenté par l'être humain (dans le cas précis, par l'homme) lorsqu'il cédait à la convoitise de la chair par l'acte intérieur du "désir". L'éloignement de la signification sponsale du corps comporte en même temps un conflit avec sa dignité de personne: un authentique conflit de conscience. De ceci, il ressort que la signification biblique (et donc théologique également) du "désir" est différente de la signification purement psychologique. La psychologie décrira le "désir" comme une intense orientation vers l'objet à cause de sa valeur particulière: dans le cas considéré, à cause de sa valeur "sexuelle". A ce qu'il semble, nous trouverions cette définition dans la plus grande partie des ouvrages consacrés à ce genre de thèmes. Sans sous-évaluer l'aspect psychologique, la description biblique met cependant surtout en relief l'aspect éthique, étant donné qu'il y a une valeur qui se trouve lésée. Le "désir" est, dirais-je, la duperie du coeur humain à l'égard de l'éternelle vocation de l'homme et de la femme à la communion à travers un don réciproque, une vocation qui a été révélée dans le mystère même de la création. Ainsi donc, lorsque le Christ se réfère "au coeur" ou à l'homme intérieur dans le Discours sur la Montagne Mt 5,27-28 ses paroles ne cessent d'être empreintes de cette vérité sur l'"origine" à laquelle, dans sa réponse aux Pharisiens Mt 19,8, il avait ramené tout le problème de l'homme, de la femme et du mariage.De

2. L'éternelle vocation dont nous avons cherché à faire l'analyse en suivant le Livre de la Genèse (surtout Gn 2,23-25 et, dans un certain sens, l'attirance éternelle et réciproque de l'homme vers la féminité et de la femme vers la masculinité, sont une invitation faite à travers le corps et non à travers le désir au sens des paroles de Mt 5,27-28. Le "désir", comme réalisation de la concupiscence de la chair (également et surtout dans l'acte purement intérieur), amoindrit la signification de ce qu'étaient - et que, substantiellement, ne cessent d'être - cette invitation et cette attirance réciproque. L'éternel "féminin" (das ewig weibliche), comme du reste l'éternel masculin, même sur le plan de l'historicité, tend à se libérer de la pure concupiscence et cherche à s'affirmer au niveau propre des personnes. Cette honte originelle dont parle Gn 3 en donne un témoignage. La dimension de l'intentionnalité des pensées et des coeurs constitue un des principaux courants de la culture humaine universelle. Les paroles du Christ dans le Discours sur la Montagne confirment précisément cette dimension.

3. Néanmoins, ces paroles expriment clairement que le "désir" fait partie de la réalité du coeur humain. Lorsque nous affirmons que le"désir" représente une "réduction" par rapport à l'attirance originelle et réciproque de la masculinité et de la féminité, nous avons à l'esprit une "réduction" intentionnelle, presque une limitation ou une fermeture de l'horizon de l'esprit et du coeur. C'est une chose, en effet, que d'avoir conscience que la valeur du sexe fait partie de toute la richesse des valeurs avec laquelle l'être féminin apparaît à l'être masculin. C'est une autre chose de "réduire" toute la richesse personnelle de la féminité à cette unique valeur, c'est-à-dire au sexe comme objet convenant à la satisfaction de sa propre sexualité. On peut faire le même raisonnement, au sujet de ce qu'est la masculinité pour la femme, bien que les paroles de Mt 5,27-28 ne se réfèrent directement qu'à l'autre relation. Comme on le voit, la "réduction" intentionnelle est surtout de nature axiologique. D'une part, l'éternelle attirance de l'homme vers la féminité Gn 2,23 libère en lui - ou peut- être devrait libérer en lui - une gamme de désirs spirituels et charnels de nature surtout personnelle et "de communion" (cf. l'analyse de l'"origine") auxquels correspond une hiérarchie proportionnelle de valeurs. D'autre part, le "désir" limite cette gamme en dénaturant la hiérarchie des valeurs impliquée dans l'éternelle attirance de la masculinité et de la féminité.

4. Le désir fait qu'à l'intérieur, c'est-à-dire dans le "coeur", à l'horizon intérieur de l'homme et de la femme, la signification du corps qui est propre à la personne, se dénature. La féminité cesse ainsi d'être surtout sujet pour la masculinité; elle cesse d'être un langage spécifique de l'esprit; elle perd son caractère de signe. Elle cesse, dirais-je, de porter en elle l'étonnante signification sponsale du corps. Elle cesse d'avoir sa place dans le contexte de la conscience et de l'expérience de cette signification. A partir du moment où il existe à l'intérieur de l'homme - dans son "coeur" - le "désir" qui naît de la convoitise de la chair passe, dans un certain sens, à côté de ce contexte (On pourrait dire d'une manière imagée qu'il passe sur les ruines de la signification sponsale du corps et de toutes ses composantes subjectives) et qu'il tend, directement, en vertu de sa propre intentionnalité axiologique, vers une fin exclusive: satisfaire seulement le besoin sexuel du corps, comme objet propre.

5. Cette réduction intentionnelle et axiologique peut déjà se vérifier, selon les paroles du Christ Mt 5,27-28, dans le cadre du "regard" (du "regarder") ou plutôt dans le cadre d'un acte purement intérieur exprimé par le regard. Le regard (ou plutôt l'acte de "regarder") est en lui-même un acte cognitif. Lorsque la concupiscence entre dans sa structure intérieure, le regard prend un caractère de "connaissance pleine de désir". L'expression biblique "regarder pour désirer" peut indiquer soit un acte de la connaissance dont "se sert" l'homme qui désire (c'est-à-dire le caractère propre du désir tendu vers un objet), soit un acte de la connaissance qui suscite le désir dans l'autre sujet et surtout dans sa volonté et dans son "coeur". Comme on le voit, il est possible d'attribuer une interprétation intentionnelle à un acte intérieur, en ayant présent à l'esprit l'un et l'autre pôle de la psychologie de l'homme: la connaissance ou le désir entendu comme appetitus. (L'appetitus est quelque chose de plus vaste que le "désir", car il montre tout ce qui se manifeste dans le sujet comme "aspiration" et, comme tel, il s'oriente toujours vers une fin, c'est-à-dire vers un objet connu sous l'aspect de la valeur.) Cependant, une interprétation adéquate des paroles de Mt 5,27-28, demande qu'à travers l'intentionnalité propre de la connaissance ou de l'"appetitus", nous percevions quelque chose de plus, c'est-à-dire l'intentionnalité de l'existence même de l'être humain par rapport à l'autre être humain. Dans notre cas, de l'homme par rapport à la femme et de la femme par rapport à l'homme. Il faudra que nous revenions sur ce sujet. Pour conclure notre réflexion de ce jour, il faut encore ajouter que dans ce "désir", dans "le fait de regarder pour désirer" dont parle le Discours sur la Montagne, la femme que l'homme "regarde" ainsi cesse d'exister comme sujet de l'éternelle attirance et commence à n'être qu'un objet de concupiscence charnelle. A cela est liée la profonde séparation interne de la signification sponsale du corps dont nous avons déjà parlé dans la précédente réflexion.femme

- 17 septembre 1980

 
 

 

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