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A la lumière du Sermon sur la Montagne

A la lumière du Sermon sur la Montagne

Publié par Incarnare le mardi 25/08/2009 - 20:27

 Je vous le dis en effet : Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez pas dans le Royaume des cieux. [...] Vous avez appris qu'il a été dit : Tu ne commettras pas d'adultère. Eh bien moi, je vous dis : Tout homme qui regarde une femme et la désire a déjà commis l'adultère avec elle dans son coeur1

Le Christ, dans ce passage, corrige l'application faite de la loi de Moïse par les scribes et les pharisiens. Ceux qui l'écoutent alors sont des juifs qui ont grandi en apprenant à respecter cette loi. Et, dans les faits, il faut supposer qu'ils la respectent, les peines encourues étant très importantes (le Lévitique prescrit la mort pour les deux fautifs2). 

Que dénonce alors le Christ dans ce sermon sur la montagne ? Précisément, leur interprétation de la loi. Cette interprétation est biaisée (souvenons nous que lorsque la femme adultère sera amenée au Christ, l'homme adultère est introuvable dans le passage...) mais surtout elle est très littérale : les scribes et les pharisiens n'ont pas réalisé le but de la loi de Moïse. 

L'adultère, d'abord "dans le coeur"

L'exemple biblique par excellence de l'adultère est l'attitude du roi David envers Bethsabée3: le texte est assez subtil puisque Davidaperçut une femme en train de se baigner. Cette femme était très belle. Juste après, l'on apprend que Bethsabée conçut; et elle fit savoir à David : "je suis enceinte". On connaît l'issue funeste pour Ourias le Hittite, mari légitime de Bethsabée, envoyé au front pour masquer l'adultère. 

La définition traditionnelle de l'adultère est l'existence d'une relation sexuelle entre un homme et une femme dont l'un est marié à un tiers. La convoitise, elle, se situe à un autre niveau ; elle est liée au regard. Le Christ veut faire entrer ceux qui l'écoutent dans une compréhension nouvelle de la loi de Moïse : pour ce faire il établit un lien entre la convoitise et l'adultère.

L'exemple de David et Bethsabée est éloquent : la convoitise a poussé David à l'adultère. L'adultère est une réalité vécue d'abord dans le coeur. Quand le Christ conclut son Sermon sur la Montagne par "Vous donc soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait", il indique une réalité que le Catéchisme4 résume ainsi :

 Observer le commandement du Seigneur est impossible s’il s’agit d’imiter de l’extérieur le modèle divin. Il s’agit d’une participation vitale et venant " du fond du cœur ", à la Sainteté, à la Miséricorde, à l’Amour de notre Dieu.

L'Ecritude et notre propre expérience nous montrent qu'il est possible de vivre dans l'observance stricte de la loi sans pour autant jamais grandir dans la sainteté. C'est le légalisme et le moralisme. En liant convoitise et adultère, le Christ ne fait pas preuve de rigorisme mais il montre que l'important est la fidélité du coeur à la vocation de l'homme. Le Christ accomplit pleinement la promesse de Dieu5 :

 Voici venir des jours, déclare le Seigneur, où je conclurai avec la maison d'Israël et avec la maison de Juda une Alliance nouvelle. [...] Voici quelle sera l'Alliance que je conclurai avec la maison d'Israël quand ces jours-là seront passés, déclare le Seigneur. Je mettrai ma Loi au plus profond d'eux-mêmes ; je l'inscrirai dans leur coeur.

En agissant ainsi, Jésus en appelle à l'homme intérieur, parfois avec véhémence : "Pharisien aveugle, purifie d'abord l'intérieur de la coupe, afin que l'extérieur aussi devienne pur"6 Une interprétation légaliste juge les actes sans s'inquiéter de la droiture du coeur... quand la question n'est plus "qu'est ce qui est profitable ?" mais "qu'est ce qui est permis ?"7 alors on finit par faire un compromis avec le péché, par se dire "je peux être infidèle jusqu'à tel point"89.

Ce compromis avec la concupiscence est dangereux dans la mesure où il crée une suspicion plus largement sur la chair et la sexualité, alors que le péché vient du coeur de l'homme10. Cette suspicion du corps qui en résulte est véritablement au coeur du plan de Satan pour nous détourner de Dieu. Ainsi, l'éthique ne vaut rien si elle ne nourrit pas l'ethos, le désir profond de notre coeur

 

Jésus venu pour accomplir, non abolir

Faut-il pour autant renoncer à l'éthique, à la loi morale ? Cette seconde tentation est récusée par le Christ au tout début de ce discours, juste après avoir proclamé les béatitudes:

  Ne pensez pas que je suis venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir.11

La loi est utile mais ne doit pas être considérée comme le but ultime, c'est à dire idolâtrée : le Catéchisme l'indique12 : "Selon la tradition chrétienne, la Loi sainte (cf. Rm 7, 12), spirituelle (cf. Rm 7, 14) et bonne (cf. Rm 7, 16) est encore imparfaite. Comme un pédagogue (cf. Ga 3, 24) elle montre ce qu’il faut faire, mais ne donne pas de soi la force, la grâce de l’Esprit pour l’accomplir.

Accomplir vient du latin complere, qui signifie remplir. C'est ce que fait le Christ : en nous remplissant de l'Esprit, il nous donne la rédemption et nous permet de vivre la loi nous pas comme une contrainte extérieure, mais comme un désir profond de vivre la fidélité au Don.

Le problème n'est pas seulement l'adultère mais le fait que nous désirons commettre l'adultère. Si notre coeur était pur, la pensée de l'adultère nous serait désagréable. Si nous étions sous la conduite de l'Esprit, ne serions pas sous l'esclavage de la loi, car nous serions libre de liberté du Christ : cette liberté n'est un "permis de pécher" : elle désire ce qui est beau, choisit ce qui est bon et ainsi accomplit la loi.

Pour nous pécheurs, cette disposition d'esprit ne nous paraît pas naturelle et il nous faut, pour y arriver, faire un véritable passage, une Pâque, qui implique une mort à soi-même13 (que Saint Paul appelle la crucifixion de la chair14) pour entrer dans une logique, une économie nouvelles. 

Ce passage est douloureux car il implique de faire totalement confiance à Dieu et s'abandonner à Lui, ce à quoi notre être pécheur se refuse absolument - c'est même l'essence du péché originel ! On arrive ici au sens profond de la concupiscence (jusqu'ici identifiée à la convoitise et donc restreinte au domaine sexuel) décrite par le Catéchisme15 :

 Au sens étymologique, la " concupiscence " peut désigner toute forme véhémente de désir humain. La théologie chrétienne lui a donné le sens particulier du mouvement de l’appétit sensible qui contrarie l’œuvre de la raison humaine. L’Apôtre S. Paul l’identifie à la révolte que la " chair " mène contre l’ "esprit " (cf. Ga 5, 16. 17. 24 ; Ep 2, 3). Elle vient de la désobéissance du premier péché (Gn 3, 11). Elle dérègle les facultés morales de l’homme et, sans être une faute en elle-même, incline ce dernier à commettre des péchés (cf. Cc. Trente : DS 1515).

Dans notre vie chrétienne, l'Adversaire veille et ne cesse de nous frapper : il veut nous amener à un "angélisme rigoriste" ou un "permissivisme animal". Pour cela, sa tactique favorite est de nous ôter l'espérance d'arriver un jour à complètement nous débarrasser de la convoitise. Il est bon de nous rappeler alors que les plus grands saints vivaient également cette tension, et qu'ils la vivaient humblement comme un appel à se confier toujours plus dans la miséricorde de Dieu.16.

 

La loi "dans les coeurs" et l'anthropologie

La loi ainsi comprise n'est pas une norme objective ou un ensemble de commandements et de préceptes. Elle appelle le coeur humain et, s'il se laisse purifier par le Christ, en jaillit. Ainsi chacun en vient à développer une norme subjective, sans pour autant entrer en conflit avec la Vérité, puisqu'elle correspond ultimement à notre vocation à entrer dans le Don.

  • 1. Mt 5, 20;27-28
  • 2. Lv 20,10
  • 3. en 2Sa 11
  • 4. CEC 2842
  • 5. Jr 31:31-33
  • 6. Mt 23,26 : ne serait-il pas bon pour chacun d'entre nous que le chapitre tout entier nous soit proclamé plus souvent ?!
  • 7. cf. 1Co 6,12
  • 8. Cette attitude constitue aussi un contre-témoignage parfait, comme ces "fidèles" (fustigés - à raison - par Linda Lemay dans Je suis grande) qui s'offrent un péché dès lors qu'il est véniel... et pensent ainsi "gagner leur ciel" !
  • 9. Dans l'Associé du diable, Satan essaie de convaincre l'avocat du sadisme de Dieu, qui aurait créé le monde avec des règles perverses comme : "Regarde, mais surtout ne touche pas. Touche, mais surtout ne goûte pas ! Goûte, n’avale surtout pas !" : voilà à quoi condamne le légalisme, à l'opposé du plan de Dieu !
  • 10. Mc 7,21... encore un passage sur l'hypocrisie ! Comment se fait-il que cette parole ne nous frappe pas plus ?
  • 11. Mt 5, 17
  • 12. CEC 1963
  • 13. CEC 2555 : "Les fidèles du Christ " ont crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises " (Ga 5, 24) ; ils sont conduits par l’Esprit et suivent ses désirs."
  • 14. N'allons pas pour autant croire trop vite que Saint-Paul est suspicieux envers le corps
  • 15. CEC 2515
  • 16. Lc 18,27 : Ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu

 
 

 

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La presse se fait l'écho d'un livre du journaliste Ekke Overbeek indiquant que Karol Wojtyła, futur Pape Jean-Paul II (et aujourd'hui Saint Jean-Paul II) aurait avant son élection pontificale, en tant qu'archevêque de Cracovie, eu connaissance de témoignages de faits de pédo-criminalité (la presse ne relaie ni le nombre ni la nature des faits) et n'aurait pas apporté la réponse appropriée (à savoir le signalement des faits aux autorités civiles et le déclenchement d'une enquête canonique aboutissant au renvoi à l'état laïc des malfaiteurs).

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